2e partie : Des mesures fiscales complémentaires

…suite de l’article de la semaine dernière…

Élargissement des obligations déclaratives des trusts

Les obligations déclaratives « événementielles » et annuelles pesant sur l’administrateur d’un trust sont étendues (ord. art. 13,2 ° ; CGI art. 1649 AB modifié). Elles concernent à compter du 13 février 2020 l’administrateur d’un trust établi ou résidant en dehors de l’UE lorsqu’il acquiert un bien immobilier, ou qu’il entre en relation d’affaires, en France.

Les obligations déclaratives visaient jusqu’alors l’administrateur d’un trust dont le constituant ou l’un au moins des bénéficiaires résident fiscalement en France ou qui comprend un droit ou un bien qui y est situé ainsi que l’administrateur fiscalement domicilié en France.

Les informations « événementielles » devant être déclarées sont précisées. Elles concernent :

-la constitution, la modification ou l’extinction, ainsi que le contenu des termes du trust ;

-les informations relatives aux nom, prénoms, adresse, date, lieu de naissance et nationalité des bénéficiaires effectifs des trusts, qui s’entendent comme toutes personnes physiques ayant la qualité d’administrateur, de constituant, de bénéficiaire et, le cas échéant, de protecteur ainsi que de toute autre personne physique exerçant un contrôle effectif sur le trust ou exerçant des fonctions équivalentes ou similaires.

L’obligation de déclarer chaque année la valeur vénale des biens et droits et des produits capitalisés est inchangée.

Signalement de discordances

Les informations déclarées par les trusts sont conservées dans un registre placé sous la responsabilité du ministre du Budget. Les professionnels tenus à la vigilance (visées à l’article L. 561-2 précité) et les autorités de contrôle signaleront à l’administration toute divergence constatée entre les informations conservées dans le registre d’une part, et les informations sur les bénéficiaires effectifs dont elles disposent, d’autre part, y compris l’absence d’enregistrement de ces informations (ord. art. 14, 1° ; LPF art. L. 102 AH).

L’administration informera l’administrateur du trust de la divergence signalée de manière à lui permettre de formuler des observations. En cas d’acceptation du constat de la divergence ou de réponse suffisante de l’administrateur, l’administration modifiera ou complétera les informations conservées dans le registre.

En l’absence de réponse, ou à défaut de réponse suffisante de l’administrateur, le registre mentionnera la divergence et une amende de 20 000 € pourra être infligée au trust (CGI art. 1736 IV bis).

Ces mêmes mesures s’appliquent pour le registre national des fiducies (c. civ. art. 2020).

Nouvelles informations dans FICOBA :

Ce sera désormais plus difficile aux fraudeurs de cacher des avoirs détenus dans un coffre en banque :étonnament, le fisc n’était auparavant pas au courant du fait que les contribuables disposaient d’un coffre. Désormais cette lacune est comblée :

Outre la déclaration de l’ouverture et de la clôture des comptes de toute nature auprès de l’administration fiscale (informations regroupées dans le fichier commun des comptes bancaires FICOBA), les établissements financiers doivent désormais aussi déclarer la location de coffre-fort.

On peut se demander comment se passeront les futurs contrôles fiscaux : en effet on voit mal l’inspecteur demander ce qu’il y a dans le coffre, ça laisserait tout le loisir au fraudeur de le vider. En revanche, on peut supposer que les agents de Bercy fassent ouvrir sans demander l’avis du contribuable et si possible par surprise, lors d’une perquisition – se pose alors quelques problèmes techniques, comme l’ouverture du coffre sans la clé : en général facturé 5.000 € environ (qui paie ?)

En conclusion, avant de louer un coffre, il faut désormais tenir du compte du fait que c’est probablement un facteur déclencheur de perquisitions… de quoi décourager les fraudeurs(?)

Autres dispositions : les informations sur les comptes détenus par des résidents français dans des établissements étrangers exerçant leur activité en France en libre prestation de service (ord. art. 13, 1° ; CGI art. 1649 A modifié).

Pour les comptes qui ont déjà fait l’objet d’une déclaration au 13 février 2020, les établissements procèdent à l’ajout des données relatives à la location de coffre-fort le 31 décembre 2024 au plus tard (ord. art. 18, IV).

références documentaires

Prise sur l’habilitation donnée au gouvernement par la loi 2019-486 du 22 mai 2019, dite « loi PACTE », l’ordonnance 2020-115 du 12 février 2020 a pour objet de transposer la cinquième directive anti-blanchiment 2018/843, transposition qui devait, en principe, être effectuée au plus tard le 10 janvier 2020.

L’ordonnance vise également à compléter la transposition de la quatrième directive anti-blanchiment 2015/849 et, plus généralement, à renforcer le dispositif national de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Ce dispositif s’appuie, pour beaucoup, sur le registre des bénéficiaires effectifs et a donc une incidence sur toutes les sociétés non cotées.

L’ordonnance est complétée de deux décrets d’application, tous deux du 12 février 2020.

Entrée en vigueur immédiate. L’ordonnance et ses décrets d’application sont entrés en vigueur le 14 février 2020, à quelques rares dispositions près. Une mesure transitoire est notamment prévue pour assurer, au plus tard le 1er avril 2020, la transmission du stock des informations relatives aux bénéficiaires effectifs par les greffes des tribunaux de commerce à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) chargé de la centralisation du registre des bénéficiaires effectifs (ordonnance art. 18).